Parole d’expert : prévenir des dommages aux ouvrages, un enjeu pour la filière gaz.

Dans cette interview, Bernard Danielou, formateur / concepteur à Energy Formation, décrypte les enjeux et défis concernant les dommages aux ouvrages sur les réseaux gaz, et revient sur les règles essentielles à respecter.

Qu’est-ce qu’un dommage aux ouvrages ? 

D.B : "Pour GRDF, un dommage aux ouvrages gaz correspond à un dommage sur un ouvrage enterré avec fuite de gaz. Ce dommage est signalé, si les deux critères précédents sont réunis, au Ministère du développement durable comme le stipule le contrat de concession qui lie l’autorité concédante (syndicat d’énergie, commune…) et le concessionnaire (gestionnaire du réseau gaz). Il fait l’objet d’une analyse par les acteurs concernés. 
Plus globalement, un dommage aux ouvrages est une agression, une détérioration (avec ou sans fuite) constatée sur un ouvrage en exploitation.

Cet incident ou accident peut générer selon son degré d’importance une coupure chez les clients raccordés sur le réseau endommagé.

Statistiquement, chaque année, GRDF constate que 80% des dommages aux ouvrages (DO) se situent sur des branchements et 90% des DO ont lieu dans le fuseau d'incertitude de la canalisation ou du branchement. 

A noter : Les réseaux et branchements gaz sont cartographiés sur des plans détaillés disponibles à différentes échelles. L’ouvrage se trouve, par rapport à sa position cartographiée dans un fuseau avec une incertitude maximale de localisation qui dépend de la classe de précision attribuée au plan ou aux éléments cartographiés. La majorité des ouvrages gaz sont aujourd’hui cartographiés avec une classe de précision A, ce qui veut dire que le fuseau d’incertitude de l’ouvrage est inférieur ou égal à 50 cm pour les ouvrages souples et inférieur ou égal à 40 cm pour les ouvrages rigides. 

Un dommage aux ouvrages entraine une série de conséquences :

  • Environnementales : en cas de fuite de gaz, du CO2 est rejeté à l’atmosphère.
  • Satisfaction client : selon le type de dommage, il peut y avoir des réparations provisoires ou non et suivant le degré de dégâts une coupure d’alimentation peut être nécessaire avec une remise en service plus ou moins rapide des clients.
  • Économiques : les réparations coûtent très cher (main d’œuvre, matériel, terrassement…)
  • Organisationnelles : il faut mobiliser des équipes immédiatement, revoir l’organisation d’un ou plusieurs chantiers, déplacer du personnel et des véhicules…"

Quel est l’enjeu de formation et compétences concernant les dommages aux ouvrages ?

D.B : "Afin de prévenir des dommages aux ouvrages, il est essentiel de former les intervenants à la règlementation travaux tiers, mais aussi à la lecture d’un plan de cartographie et au repérage des réseaux avec le matériel adapté."
 

Quels sont les normes et réglementations à respecter ?

D.B : "Afin d’encadrer les dommages aux ouvrages, la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 vise à renforcer la protection de l'environnement et inclut des dispositions pour la prévention des dommages.

Le décret n° 2011-1241 du 5 octobre 2011, qui découle de la loi précédente, appelé "Décret anti-endommagement" (DAE), établit les obligations des différents acteurs (exploitants, maîtres d'ouvrage, entreprises de travaux) pour prévenir les dommages aux ouvrages. 
Ce décret permet de déclencher des rencontres (visites des réunions préalables, visites de chantiers), des géo détections et marquages piquetages des ouvrages en amont de toute intervention.

L’arrêté du 15 février 2012 vient détailler les modalités d'application du décret de 2011, notamment en ce qui concerne les procédures administratives de travaux et les mesures de sécurité à respecter.

En 2018, une modification règlementaire a introduit au sein du DAE l’obligation d’obtenir une « Autorisation d’Intervention à Proximité des Réseaux » (AIPR). Il s’agit d’une preuve validant les compétences des personnes qui interviennent : elles doivent ainsi passer un test de compétences avant d’intervenir pour savoir si elles sont aptes à travailler et à exécuter les travaux en respectant la règle."

Quelle est l’actualité/défi pour ce secteur ?

D.B : "Aujourd’hui, l’un des enjeux majeurs est de sensibiliser au fait que les dommages aux ouvrages n’ont pas seulement un impact matériel mais aussi environnemental et sociétal. Cela a toujours été une préoccupation mais maintenant que l’on sait mesurer l’impact, la prise en compte est beaucoup plus importante.

Suite à une diminution des dommages aux ouvrages, l’impact environnemental est plus réduit qu’auparavant avec la mise en place du DAE, puisque chaque intervenant sur le chantier peut faire part en amont de ses préconisations afin que l’ensemble des acteurs ait la même information et soit aligné, ce qui réduit considérablement le nombre de dommages aux ouvrages. 

De nombreuses actions sont engagées pour réduire au maximum les dommages aux ouvrages : 

  • La production de cartographies précises pour les exploitants de réseaux.
  • Le travail sur le tracé des zones de sécurité (classe de précision) pour les exécutants et maitres d’ouvrages.
  • La liste de matériels conformes à utiliser.
  • La mise en place de suivi de travaux et d’accompagnement des acteurs intervenants sur ou à proximité des ouvrages gaz
  • La multiplication des réunions préalables avant travaux, des visites terrain en cours de chantier.
  • La sensibilisation et la formation des maitres d’œuvre, maitres d’ouvrage et opérateurs travaux."

Culture sécurité

Quels sont les risques spécifiques d’intervention sur des dommages aux ouvrages ?

D.B : "Lors d’une intervention dommage aux ouvrages, le technicien intervenant pour réparer le dommage mais aussi celui qui vient de causer le dommage sont soumis à plusieurs risques :

  • Les risques spécifiques gaz : pression, bruit, inflammation,
  • ainsi que les risques dits généraux : risque routier, chute de plain-pied…"

 

Quelles sont les mesures de prévention collectives et individuelles qui sont mises en place pour se protéger de ces risques ?

D.B : "Les mesures de prévention à adopter reprennent des éléments évoqués un peu plus tôt comme posséder la DT (Déclaration de projet de Travaux) et la DICT (Déclaration d'Intention de Commencement de Travaux) avec les réponses des exploitants ainsi que leurs plans, la détection et le marquage piquetage des réseaux et branchements (utilisation de plans et d’appareils de géo détection adaptés), maintien en place de ce marquage, mais aussi la rédaction d’un plan de prévention en amont des travaux et de précautions à prendre (un balisage adapté de la zone de chantier pour que seules les personnes qui sont autorisées, pénètrent dans la zone concernée une approche prudente des ouvrages). Et bien sûr le port des équipements de protection individuels adaptés (casque, gants, chaussures de sécurité, vêtements image de marque…)."

Portrait d’expert    

Bernard a commencé sa carrière en tant qu’exploitant avant d’évoluer sur un poste de manager associé à une mission de chef d’exploitation.

C’est en 2016 qu’il a rejoint Energy Formation en tant que formateur / concepteur.

Aujourd’hui chez Energy Formation, Bernard anime les stages liés au domaine des travaux tiers pour GRDF, Natran et leurs prestataires ainsi que Storengy.

Il est également formateur pour l’AIPR car Energy Formation est validé par le ministère comme étant centre de formation agréée.

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